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Killer Queen

  Et d’un coup, ils se sont mis au garde à vous. Soldats fiables, qui ne tremblent pas quand il faut se dresser. Je les ai senti les u...

mardi 27 juin 2017

J-100 : Seratus hari lagi.

J'imagine que préparer un voyage doit s'apparenter ("apparenter" - verbe du 1er groupe - terme employé pour - par exemple - expliquer poliment et sans sarcasme que Manuel Valls a quitté le PS pour s'acoquiner avec les Marcheurs d'Emmanuel) à la préparation d'un film.

Je vous dis ça... je ne fais pas de films.

Enfin je "me" fais des films mais quelque chose me dit que c'est sensiblement différent.

Mais j'ai le sentiment qu'il doit y avoir des similitudes ("similitude"... ouais non. Achetez-vous un dictionnaire) entre voir du pays et filmer une fiction.

On ne veut rien oublier, on veut que ce soit grandiose, on veut que ça reste gravé à jamais dans nos mémoires et nos coeurs, on veut frissonner, rire et pleurer, on veut être bouleversé, transcendé. On veut un planning fluide, des haltes paradisiaques et un toit (ou au moins un lit) tous les soirs.
On veut penser à tout avant de se lancer. On veut tout prévoir.

Au final, on oublie le dentifrice ou l'anti-moustique. On oublie qu'on n'a pas souscrit de forfait international. On oublie les égos des uns, des autres. La météo. Les grèves en France, les pannes ailleurs. Et notre film/voyage prendra une tournure... plus exotique.



J-100 avant mon décollage pour Bali.
Oui. J'y retourne. Je ne vous avais pas dit ? Ça m'étonne. Je suis en boucle.
Je mange, je dors, je bois, je respire indonésien depuis plusieurs mois.
Je compte. Les jours et mes sous.
Je m'interroge.
Où aller ? Combien de temps ? Comment y aller ? Est-ce que je veux rencontrer d'autres touristes ? Est-ce que je ne veux  pas plutôt m'incruster chez les locaux pour me faire adopter par une famille balinaise ? Est-ce que je vais vraiment essayer de leur parler en indonésien ? Est-ce que je vais oser ? Qu'est-ce que je fais de mon téléphone quand j'irai me baigner ? Et mon sac ? Et si je prenais un vélo pour rigoler ? Est-ce que c'est risqué si je veux donner une caresse à un chien tout moche ? Ça coûte combien de roupies de sillonner Bali avec un chauffeur privé ? Et comment elles font ces australiennes pour être aussi bien foutues en buvant autant de bières ? Et il est où le plus beau soleil couchant ? Est-ce que c'est vrai que si je bois du vinaigre avant de dormir, mon sang s'acidifie (je suis quasi sûre que ça se dit) et dégoûte le moustique gourmet ? Comment je fais pour choisir mon chauffeur/guide/francophone/futur prof d'indonésien maintenant que j'en ai contacté whatmille et qu'ils ont l'air tous aussi gentils les uns que les autres et qu'ils ont tous une famille à nourrir hein ? Comment je choisis à qui je dis non ? Est-ce que je ramène des petits souvenirs de Paris pour mes futurs amis que je ne manquerai pas de me faire ? (il est impossible que la poisse prenne l'avion avec moi) Est-ce que ça ne serait pas un peu présomptueux et colonialiste comme attitude ? Est-ce que je leur dis que selon mon arbre généalogique j'ai du sang hollandais qui coule dans mes veines (mais je ne sais pas quel bras) ? Est-ce que je prends une villa et je rayonne en partant de là ? Est-ce que je dois prévoir mon itinéraire ou je verrai sur place ? Est-ce que je vais réussir à écrire tous les jours pour raconter mon voyage ? Comment on dit "procrastiner" en indonésien ?

Je suis fatiguée. Je suis partagée. 100 jours c'est beaucoup. 100 jours ce n'est rien.
Je ne serai jamais prête. Et paradoxalement je ne veux rien préparer.

Je pars dans tous les sens. Je me perds sur le site Balisolo. Je plonge avec Villa-Bali. Je me projette. Je m'y vois. Je sens la caresse du soleil le matin tôt, j'entends les coqs, je vois les rizières en plissant les yeux, une brume de chaleur qui monte de la terre. Je sens l'odeur du kopi épicé et je salive d'avance. Tout à l'heure, je mangerai sûrement un pancake à la banane ou à l'ananas. Et je me promettrai de goûter l'autre demain. J'enfilerai un short par dessus mon bikini et je serai prête. Je suis déjà prête. Je suis super prête, assise à mon bureau ou caler dans mon canapé un peu raide. Prête à partir, prête à vivre.
Je sais déjà que ça va être un véritable crève-coeur de rentrer. C'est à dire que je ne suis pas encore partie mais je veux déjà y retourner.

Je n'aurais jamais le temps de tout voir. Les chutes d'eau, les rizières, la jungle, les temples, les villages reculés, les plages de rêve, les gens, les marchés.
Ici tout me pèse, ma routine, le métro, le boulot, les horaires. J'ai par contre une réserve d'énergie insoupçonnée pour l'île des Dieux. Tout vivre, tout goûter, tout ressentir, tout capturer avec mes yeux, avec mes mots. Tout graver à jamais dans le marbre de mon cerveau têtu.

Je veux que mon film soit mythique. Que mes acteurs soient parfaits. Je veux tenir le rôle principal, savoir aussi utiliser la lumière, choisir une bande son impeccable. Que mon histoire tienne la route. Et pourquoi pas... envisager une suite ?

Dites... c'est quand qu'on arrive ?





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