Ça a commencé avec un Ludovic (oui, Ludovic, grâce à qui j'ai un peu redoublé ma seconde vu que je passais tout mon temps en classe à relire ses lettres et lui répondre) pour arriver 17 ans après (le premier qui trouve que ça fait long, je lui pète les dents) avec un D. (je suis sûre qu'il tient à garder son anonymat l'animal). En passant par une flopée de prénom en M, en Y, en T et en O qui ont toujours su me faire vivre à leur rythme quitte à provoquer quelques arythmie du côté de mon palpitant. Et oui, l'alphabet, ça me connait.
Ça a démarré avec des lettres. Vous savez, ces machins en papiers qu'on envoyait par la Poste.
Aujourd'hui ça se poursuit en SMS. Voire en Skype. Parce que les voyages, ça forme la jeunesse (voilà mon secret beauté).
Et là, à cet aveu, je me sens un peu con. Un peu.
Surtout que bon. Quitte à être honnête jusqu'au bout et vous savez combien la transparence compte pour moi : ben j'ai pas pris une ride là non plus. Je n'ai toujours pas intégré qu'il ne fallait pas que j'attende après un mec, qu'il fallait que je sois indépendante et pas juste pour leur faire plaisir et me donner un petit cachet inaccessible.
Parce que de toutes façons, même ça, je le fais mal.
Je ne sais toujours pas combien de temps je dois mettre pour répondre. Dans le doute, je réponds souvent dans la seconde.
Je n'ai pas la moindre idée du temps que je dois laisser entre deux échanges. Dans le doute, souvent je romps le silence en mode panique et un peu culpabilisante.
J'ignore complètement les principes de base qui régissent ces messieurs. La plupart du temps, je traduis à ma façon ce qu'ils envoient. C'est à dire avec mon cerveau.
Je ne prends aucun conseils glanés autour de moi en compte. A part ceux qui m'arrangent voire me rassurent. "mais voyons Fanny, bien sûr qu'il est fou de toi, comment pourrait-il en être autrement !? Mais s'il ne t'a pas encore répondu depuis 2h, c'est parce qu'il a été pris en otage et négocie actuellement avec ses ravisseurs pour les attendrir et être relâché rapidement pour t'écrire des mots doux !"
C'est évident.
Oui. Sauf que là, ça fait 36 heures. Une demi-nuit, une longue journée, une longue nuit et une matinée.
36 heures c'est beaucoup trop.
Surtout si je vous dis que je me suis bien tenue et que je n'ai encore rien envoyé.
Qu'est-ce qu'il peut bien faire de plus important depuis 36 heures ?
A part avoir été victime d'un accident où il ne serait aucunement défiguré ni blessé sérieusement, à part une urgence domestique du style incendie géant mais pas dangereux, à part le vol qualifié de son téléphone portable (ne riez pas, on m'a servi cet excuse il y a un mois à peine et j'y ai cru) et la perte simultanée de sa connexion internet... Je ne vois pas.
Pis d'abord. Quand on m'écrit "à demain" un Lundi à 1h49 du matin, moi je crois sincèrement qu'on parle du jour d'après. Pas du film. Alors expliquez-moi pourquoi le lendemain je me fais tous ces scénarios catastrophes ?
Je suis à ÇA de craquer. Toute cette pression, tous ces synopsis que mon cerveau malade ne manque pas d'inventer. Comme la possibilité qu'il ait une femme et des enfants et qu'il ait omis de me le dire.
En toute logique, je ne devrais pas passer 36 heures de plus sans crier mon désarroi dans un message Skype vibrant de sincérité. Je me donne 6h avant de me ridiculiser.
Et d'expérience, ce message devrait me valoir un sermon (l'enthousiasme, c'est mal) et une mise à pied souvent suivie d'un silence digne de celui qu'on réserve à ses ex.
Ex. Je fais ça bien.